Une âme de métalleuse

Photo de Viacheslav - Nature morte

Photo de Viacheslav – Nature morte

Je ne suis pas dans mon assiette. N’allez pas croire que c’est ma tasse de thé. Non, non, au contraire. En général, j’ai la tête à toute épreuve et le reste aussi d’ailleurs. Car sans ce « reste », je serais quoi ? En fait, je ne sais pas. Je n’ai pas l’imaginaire assez développé pour me « concevoir » sans ce « reste ».

Bref, hier, une personne mal intentionnée m’a tordu le cou sur un morceau alimentaire, un peu dur. Le louche de l’histoire est que le Père Couteau en a fait tout un plat. Normal, il a plusieurs dents contre moi et se fait une joie de me scier, même émoussées, de ses remarques. Je reste stoïque et à chaque fois il se casse une dent, la nappe de service se plie de rire, le pain grille sa mie et la chaise en reste … assise.

D’ailleurs la chaise, celle du milieu de table, pourrait nous en raconter de belles et de moins piquantes. Je ne vous cafterai pas le jour où une Québécoise en mal de chanter a pris son pied (elle n’était pas unijambiste) auprès d’un jeune membre de la famille. Il y a des chants plus salvateurs aux onomatopées revigorantes que de textes noyés dans une marinade romantique, un verre à la main.

En fait de verre, celui de bout de table, en partant de ma gauche, à trois assiettes d’ici, m’a teinté le cœur de sa vibrante harmonie aux contacts effervescents lors d’un repas officiel et bien guindé de la famille. Moment inoubliable qui lui fêla, hélas, son cristal par le haut, sa vie basculant dans le vide en une fraction de seconde, choc sur le napperon de la romance. Il survit et j’avoue, trop loin de moi. Et, si j’avais une larme à déposer elle serait pour effacer ce traumatisme.

J’en ai jamais fait confidence à mes grands frères, des brutes bien épaisses entre assiette creuse à la soupe de potiron et bœuf bourguignon dans la marmite de fonte, moi qui ne suis que délicatesse, sensibilité, et raffinement.

Enfin bref, tout en vous parlant de trauma, j’en suis moi-même dans un état très avancé, enfermée dans un tiroir parmi les rebuts de la cuisine. Finirais-je dans la poubelle « tri » des métaux pour me diriger vers une autre grande poubelle d’un mélange ferreux et être digérée dans la fusion du Grand Tout Métalleux et transmutée dans un nouveau corps pour une nouvelle fonction ?

Vraiment, je suis à ramasser à la petite cuillère aujourd’hui.

©Max-Louis MARCETTEAU

2 réflexions sur “Une âme de métalleuse

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