Nous étions nus et imparablement fragiles et soufflés

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Agenda Ironique OctoNovDec 2018


Nous étions nus et imparablement fragiles et soufflés par la nature même de notre décision de vivre ensemble sur cette île, toi en Robinwoman et moi en Crusoéman.
«Incroyable ! Sens-tu l’air chargé d’iode, le goût du sel qui pénètre la peau ? Regarde ! La mer s’approche, c’est marée haute. Regarde, l’étendue mergnifique. ». Je regardai. Oui, la mer s’étalait, devant nous. »(1)

J’en avais gros sur la patate de me voir dans ce film avec des dialogues au creux de la vague et cette voix off qui nous envoûtait par défaut. Cet avant midi-là, les amis et quelques membres de nos familles triés volets ouverts et lumières éteintes, étaient autour de nous par une tablée bien garnie et « tandis qu’ils riaient à nouveau, Madeleine se leva, incommodée par le grognement des mioches, s’approcha de son amie et lui glissa à l’oreille : « Paradoxalement tu deviens drolatour avec cette diatribe, trouverais-tu que je sens la crevette arctique ? »(2)

Je compris rapidement, pour une fois, que nous étions entraînés dans une autre dimension et que mon dernier film n’allait pas être dévoyé en commentaires dissociés si ce n’était de rires à braises bien senties. J’allais vomir, quand Paul, ami d’enfance, s’écria :« Fatalimace ! Nous voici en insolitude ! La route court sous l’eau d’artificelles habitudes ! Met tes bottes, enfant. Les écriames et les pingouinations attendront que la polimalie des virgules se solve en délibules mirifiques ! »(3)

Un moment d’y n’inspiration se souleva dans nos poitrines. Paul s’envolait pour une autre crise de déraison. Nous étions sûrs qu’il n’avaient pas avalé sa médication insoutenable. Aujourd’hui, il revivait parmi nous par sa grandeur d’âme enserrée dans les griffes du délire phrasabool. Je n’avais pas cette envie de rire qui vous chantouille la glotte mais vous plantouille une ambiance et c’est à ce moment très précis dont la minute doit encore se souvenir à défaut d’avoir perdu le sens de la mesure : « Alors, on n’a qu’à prononcer des mots d’amour comme ça, ils se tiendront chaud ! » (4) Gertrude avait dévié les regards si ce n’est l’attention par sa voix de soprano à deux octaves qui limpide nous déposséda de l’intervention précédente en toute bonne cause que peu d’entre-nous avaient déchiffré les tenants …

Entre temps dont je ne peux dire la fraction sur l’horloge du salon pendue pour un bel effet de tenir son rôle en sonnant par sept minutes de sept minutes, par cause d’un ressort à mémoire de forme inventée par une horlogère de Toscane … je croisais le regard amoureux de ma femme quand « Ma mère lui offrit des jumeleines, que nous mangeàmes en nous fixant les yeux dans les yeux un rendez-vous créaginaire. » (5) Nous étions irréparablement amoureux. J’en suis, encore et encore, attristé. En fait, j’étais pris au piège et ne pouvais me sortir de cette possessivité qu’ont les femmes de vous embrigader par pur égoïsme. Et je regardais en coin, mon autre ami d’enfance, Onésime, qui n’était pas marié lui, ni même en concubinage notoire. Il était libre comme l’air et respirait sa propre vie d’homme libre. Et c’est beau un homme libre. « A ce momentlà, Onésime réalisa à quel point il était en retard. Les Douze Coups de Midi sonnaient au clocher et les odeurs de brioche remplaçaient allègrement celles des Mc Bacon et autres Cheeseburgers. Il s’empressa de rentrer chez lui, honteux et confus, et jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus. » (6) Il n’aimait pas ce genre de regroupement de meute. Je l’aime Onésime. Il le sait et me plaint d’être enchaîné et d’être un lâche à ma façon. Il me disait que j’étais, peut-être, atteint de cette maladie qui frigorifie les hommes mariés de longue date mais « Pas encore. La pinguouination est assez complexe, il va me falloir plus de temps. » (7) Car il travaillait en tant que chercheur au CNRS (Centre Naturel Réservé aux Sensoriels) et se prenait la tête dans les deux sens du terme dans ses propos comme dans ses recherches qui n’attendaient que le moment propice à s’épanouir ou s’évanouir.

Quand j’entendis, juste à côté de moi : « Chuuuutttt, Elodie, ils sont pour moi, les derniers mots de la fin !Tu peux pas t’en empêcher ! Pffff ! C’est pas moi, c’est le Zébulon» (8) Je reconnaissais bien Elodie et son amie Belette, toutes deux à se crêper le chignon et pourtant toujours ensemble comme deux électrons libres dans le monde des adultes qui n’avaient plus aucune prise sur leur devenir et l’avenir comme une utopie n’avait pas à leurs yeux l’espoir que l’on devrait donner à nos enfants …

Mais qu’importe, cette journée était comme toutes celles passées avant les fêtes de fin d’année. Nous nous réunissons avant de nous séparer chacun dans notre monde, mine de rien, avec des liens, toujours aussi solides …

© Max-Louis MARCETTEAU 2018

18 réflexions sur “Nous étions nus et imparablement fragiles et soufflés

    • Bon jour,
      Diantre, merci du compliment 🙂
      Il fallait trouver « l’angle d’attaque » pour soliver avec les phrases imposées dans un texte et développer une cohérence … 🙂 Pas simple, mais vos mots me rassurent … 🙂
      Max-Louis

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  1. Foi de volaille, votre ajustement prend toute les aisances auprès de la blondeur zébulonienne belettique, en gras, en italique, et même en renvois. Le bicarbonate de sodium devrait tout faire digérer.
    Magnifique jeu de fins du fin, Max-Louis, je suis totalement sous la subjugaison du participe présent.
    Sans pour autant sombrer dans le gras double de la déchetterie du père Noël est une ordure, je me demandais si la complexité toute perplexe se prolongerait jusqu’à la saint père Noël, histoire d’aller skier du splendide à mourir de rire.
    Mes hommages à Maître Paul ainsi qu’à Onésime, Gertrude, Madeleine et les autres.

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    • Bon jour Jobougon,
      Je suis à la limite de la pâmoison et me retiens à la rambarde de quelques ponctuations à la lecture de vos mots qui se tissent comme un lustre brillant de sa vive audace d’éclairer mon humble cerveau que vous émonder à raison … 🙂
      Il est vrai que je pusse (puce ?) aller plus loin et les personnages s’y prêtent pour chapitrer cette assemblée extraordinaire en attente de jour en jour d’un Noël probable de belles guirlandes phrasées à souhait de bonne (et pas soubrette) fin d’année…
      Bref, je reste un admirateur discret et possiblement attachée (pas trop serrés, les poignets) à vos (vous) mots dans ces contextes aussi complexes et que fascinants … 🙂
      Max-Louis

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