« La première camérière entra »* et ressortit trois heures un quart plus tard allongée sur quatre lames de parquet chêne de premier choix fixées par des lanières de cuir le tout porté par quatre solides gaillards cheveux attachés style queue de cheval et costumés à l’étoffe tartan.
Les pleurs avaient pris les mouchoirs en otages et les toussotements étaient débordés par les élans des regrets de cette défunte charmante et d’agréable compagnie… de son vivant.
Le temps n’avait pas le temps de s’arrêter pour souhaiter bonne chance à l’inspecteur Lô-Tho désigné d’office pour enquêter et qui se frottait la partie la moins accessible du dos avec une baguette (et pas de pain) de bambou qu’il avait acheté quelques jours avant son dernier anniversaire au vide-grenier annuel des Huiles Non-Essentielles.
La cadavre sur la table (et pas à manger) imputrescible de dissection avait une figure reposée pour son âge même si le maquillage de fond s’était délayé sur les joues saillantes, et le menton joliment dessiné à la Huntress.
Le médecin qui était légiste à la morte-saison n’avait pas détecté le moindre indice d’un décès suspect… ce qui était fort… suspect. En effet une personne qui mourait naturellement c’était louche, voire inconvenant même qu’un enterrement en grande pompe (et pas à vélo) se faisait à pied le parapluie de la décence ouvert sur le chapitre « Il fait noir quand l’assassin se lève » (Job -24 -14) ce qui était une humiliation au coefficient 120 pour la famille qui n’avait pas assez de mascara sur les yeux pour planquer sa honte.
Rhi (prénom de Lô-Tho, suivez) faisait le tour de la dépouille bien désencombrer de ses viscères et autres tissus qui riaient jaune à la pointe d’un scalpel tout juste sorti de son blister made in china ce qui en disait long sur cet ustensile qui avait parcouru des milliers de kilomètres en cargo dans une solitude qui se rongeait les ongles et appréciait une délivrance sur un corps qui n’en demandait pas tant.
Le légiste conclut qu’il n’avait pas l’indice d’un empoisonnement même frileux, d’une maladie inflammatoire déprimée, d’un kyste farceur anodin, d’une artère encombrée d’une vie bedonnante, tandis que Lô-Tho convenait en chœur qu’il n’avait pas le moindre soupçon d’un meurtre mesquin ou d’un assassinat à la Romaine, pas le moindre témoin à mettre sous lampe de la vérité, bref un corps intact sous tous rapports. Une déception, un outrage. Il se demandait d’ailleurs si elle était bien morte. Il souleva l’une après l’autre chaque paupière : la lumière était éteinte.
Il déduisit très déçu qu’elle était morte naturellement, et il se déboucha pourtant une bouteille de champagne de 33 cl qu’il partagea avec le légiste à l’humeur d’un mitigeur estival… qu’aux premières bulles glapissantes, il se posa cette ultime question : pourquoi était-elle morte naturellement ?
© Max-Louis MARCETTEAU 2021
(il n’y aura pas de suite … c’est un coup à s’embourber jusqu’au cou du stylo avec ce genre d’histoire)
* «L’Espagnole anglaise » – Cervantès – page 197
Très bon Max-Louis !
Vraiment, il n’y aura pas de suite ?
Je te souhaite le bon jour.
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Bon jour Jean-Louis,
Non, pas de suite… je pense possiblement faire une autre histoire courte avec cet enquêteur (comme précédemment) …
Merci de tes mots, passage et compliment 🙂
Bonne journée à toi en ce bon jour 🙂
Max-Louis
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Finir en bulles de champagne est plus léger qu’en queue de poisson. M’en suis allée voir Huntress et Job, suis revenue à Lô-Tho Rhi en espérant me lancer dans une aventure d’une vingtaine de chapitres ! Bernique ! tu nous laisse sur notre faim avec cette fin……….. après, je suis consciente qu’après une mort naturelle il n’y a plus trop d’options 😀 Belle soirée Max-Louis
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Bon jour Hélène,
Cette fin est, pour moi, naturelle dans la mesure où ce genre d’enquête est à « contre emploi » de ce qui doit « se faire » habituellement : victime, coupable, mobile, etc …
Merci de tes mots et passage 🙂
Bonne soirée également.
Max-Louis
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On ne peut pas rester sur une telle déception ! Cette mort naturelle reste à éclaircir…
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Bon jour Danielle,
Je comprends la frustration … 🙂
Merci de tes mots et passage 🙂
Bonne soirée.
Max-Louis
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🙂
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Ah ah, j’adore ! Ben oui, pourquoi était-elle morte naturellement ? Le saura-t-on jamais… ?
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Hélas, on n’aura pas la réponse. En effet, combien d’entre nous restons sans réponse(s) pour des questions …
Merci de tes mots et passage 🙂
Max-Louis
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