Sa lampe adhère dit-il illuminé… 9/…

Photographie Iotop_2022

Pour la deuxième fois, voici une autre histoire mais cette fois-ci de lampadaire à 4 mains sur une idée de Firenz’ du blog La plume de mouette. Chacun de nous fait paraître le texte de l’autre sur son blog et une photographie.

Chapitres 1 ICI et 2 ICI et 4 ICI et 6 ICI et 8 ICI et 10 ICI ou l’ensemble des chapitres ICI


La Russe autorité avait entrepris de soulever la trappe à nouveau. La grouillance souterraine n’avait point faibli, c’était comme une ligne de métro ou deux, aux heures de pointe et en temps de grève. Réalisant qu’il avait presque cohabité et même protégé ce microcosme sombre et peut-être gluant, Sieur réverbère faillit tourner de l’œil et du bec de gaz.

— Mais qu’est-ce donc que cette affaire ? est-ce que quelqu’un peut m’éclairer ? demanda-t-il d’une voix blanche. Il ne diffusait plus à présent qu’une lueur blafarde.

Tous se penchèrent à nouveau sur le monde miniature. Une main caressant leur barbe, les deux nains bredouillaient des sons inintelligibles ponctués de « c’est pas ça qu’on attendait », ou de « Mais à quel moment la légende s’est-elle embourbée ? »

Le Prince russe écarquillait les yeux pour tenter d’apprivoiser l’obscurité jaillissant de cet univers différent. La luciole, quant à elle, ne semblait pas émue outre mesure et continuait à papillonner, ici et là, en toute légèreté.

— Regardez ! croassa Kremaloff. Regardez cette foule d’insectes rassemblés et collés les uns aux autres ! ça pullule et ça bouge comme la plèbe attroupée au moment des soldes, ça gigote et ça remue et ça parait immobile à la fois. On dirait une toison noire, un pelage plein de pattes ondulant sous l’effet d’un vent stagnant… ! Que diable se passe-t-il dans ce recoin lugubre ?!

Les nains s’étaient tus, le lampadaire avait des remontées acides, la luciole souriait. Et tous, tous, avaient les yeux fixés sur la masse sombre.

C’est alors que s’éleva un chant au-dessus des têtes, une mélopée émergeant d’un autre espace-temps, une mélodie pentatonique parfois aigue et parfois grave, accompagnée de stridulations et de soupirs légers. C’était Luciole qui chantait, les ailes habillées de couleurs précieuses et déployées selon le tempo, dévoilant ce faisant un peu plus de ce que sa nuisette dissimulait à peine. Le spectacle était plus que charmant.

A la surprise générale, tous les insectes agglutinés se dispersèrent en dansant-rampant, laissant ainsi voir le trésor qu’ils protégeaient vaillamment.

Alors on distingua la Lucane d’or.

Sous la multitude sexapodée dormait un insecte géant, au corps et aux pattes d’or massif et aux ailes couleur turquoise et Lapis Lazuli.

Déjà à moitié anesthésiés par les chants lucioliques, ceux du dessus de la terre restèrent interdits. Sauf bien sûr le Prince Russe qui ne s’interdisait jamais rien. Et Dame Luciole qui pris son envol, après avoir déposé un baiser sur un œil vitré de Sieur Réverbère. Celui-ci se mit à rougir et à crépiter. Luciole dansa avec frénésie avant de s’engouffrer dans la cavité fantastique, l’éclairant ainsi d’une lumière nouvelle….

(texte Florence)

Sa lampe adhère dit-il illuminé… 7/…

Photographie ©Iotop

Pour la deuxième fois, voici une autre histoire mais cette fois-ci de lampadaire à 4 mains sur une idée de Firenz’ du blog La plume de mouette. Chacun de nous fait paraître le texte de l’autre sur son blog et une photographie.

Chapitres 1 ICI et 2 ICI et 4 ICI et 6 ICI ou l’ensemble des chapitres ICI


C’est lorsque la grande perche lumineuse fit un pas de côté que le Prince Kremaloff se réveilla. Et c’est lorsqu’il se réveilla qu’il se rendit compte qu’il s’était endormi.  

— Sacrebleu, comment ai-je pu m’endormir à pareil moment ?! J’ai assurément perdu la tête et le fil de tous les événements, c’est la raspoutitsa ! 

Il se souvint alors que la Luciole avait laissé choir quelques cristaux lumineux sur les couvre-chefs des nains, mais aussi quelques paillettes sur son propre carafon. Un rien fanfaron, il avait toujours aimé les paillettes, il avait donc accueilli celles-ci avec plaisir et entrain, quelques-unes dans les mains, le reste dans sa bouche grande ouverte. Il réalisait à ce moment qu’il s’agissait en fait de poudre de perlimpinpin, de celle qui vous méduse, vous assomme et vous endort. Il s’était fait berner comme un bleu et en était tout déconfit. 

Les nains avaient négocié le déplacement du lampadaire sans trop de difficulté car la Luciole s’en était mêlé et avait obtenu l’accord à grand renfort d’yeux doux et de promesse de futures étincelles à deux.  

Dans le carré libéré par la perche majestueuse, la terre ne demandait qu’à être retournée, retournée un peu plus car elle l’était déjà par tout ce changement. Pensez donc, elle venait d’être affranchie du joug de la fée électricité et pouvait à nouveau rêver  la torche du soleil.  

On remua la terre, un peu, beaucoup, sous l’œil goguenard de Sire Réverbère et le sourire malicieux de Dame Luciole, jusqu’à ce que le bruit des pelles change, s’assourdisse, et que l’on mette à jour une trappe. Au centre brillait un médaillon d’argent représentant un être fantastique et inquiétant dans la bouche duquel se trouvait l’anneau qui permettrait de soulever la trappe. Étonnamment, ou pas, des sons filtraient à travers les jointures, des sons comme de la musique, une musique comme une invitation. Alors les efforts des deux frères se combinèrent pour soulever la plaque de bois vermoulu. Ce qu’ils découvrirent sous cette plaque les laissa sans voix…  

(texte Florence) 

Sa lampe adhère dit-il illuminé… 5/…

Photographie iotop 2019

Pour la deuxième fois, voici une autre histoire mais cette fois-ci de lampadaire à 4 mains sur une idée de Firenz’ du blog La plume de mouette. Chacun de nous fait paraître le texte de l’autre sur son blog et une photographie.

Chapitres 1 ICI et 2 ICI et 4 ICI et 6 ICI ou l’ensemble des chapitres ICI


— C’est là, exactement là.
— Tu es sur ?
— Oui, absolument, c’est ce que me disent la carte, la boussole, le sextant et le fil à plomb réunis.
L’ombre immense qui avait surgi était en fait celles superposées de deux nains de bitume. La lumière est trompeuse qui allonge les êtres et diffuse des halos que l’on pourrait peut-être prendre pour des signes, signes du hasard ou symboles christiques…
— Alors, que va-t-on faire ?
— Toi, tu creuses, moi je réfléchis.
— Tu réfléchis à quoi ?
— Je réfléchis la lumière, bougre d’andouille, il faut bien que je t’éclaire !
— Et je creuse où ?
— Eh bien, là, sous le lampadaire.
— Oh là, qui va là ?!, gronda l’illuminé perché. Que vois-je ? Deux nains de jardin équipés de pioches et piolets ? Vous cherchez Blanche-Neige ? Eh bien sachez qu’il y a un bon moment qu’elle a décampé !
— Nains de jardin ? Vous vous méprenez. Il y a surement longtemps que vous n’avez vu un carré de pelouse pour ainsi divaguer. Nains des villes nous sommes, nés en zone urbaine de père en fils depuis au moins quatre générations. Regardez donc nos cravates !
— Qu’est-ce qui vous amène ici ? fulmina la perche flamboyante.

La luciole mâchouillait une brindille sortie d’on ne sait où, et observait la scène, amusée. Libre comme la lumière, elle s’était échappée de la gibecière et voletait ici et là pour mieux se réjouir du grand bazar qui s’annonçait.

Quant au Prince Russe, flairant l’embrouille, il se dit qu’il n’allait pas lanterner longtemps ici. Il voulait à tout prix éviter une rencontre avec les forces de l’ordre. Tant pis pour son breuvage divin et pour la divine bestiole, il lui faudrait trouver une prise à jus pour samovar ailleurs, et une autre attraction insectifère. Il s’apprêtait à tout remballer, quand les mots du plus petit des nains vinrent lui titiller les oreilles.
— On vient chercher notre trésor, vous êtes assis, ou plutôt planté, dessus…
Son frère ainé lui colla une taloche pour le faire taire, mais le mal était fait. Le trésor venait, en quelque sorte, de changer de futur propriétaire…

(texte Florence)