T’as le vilebrequin du cerveau qui déraille

Photographie Iotop 2020

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Je navigue à vue. Le penon en berne, les rames sur la grève, le moral dans les chaussettes … trouées … ma vie est un brouillard enflammé qui ne s’est jamais dissipé.

Le verbe éclore est absent de ma vie … je suis momifié avant d’être mort … aucun souvenir même nacré d’un amour perdu…

Ce soir, je suis devant mon velouté de potiron bergamote. Il est vingt heures. Je regarde une chaîne d’info historiquement grabataire, perclus de ses mauvaises nouvelles, figurée d’un buste, d’une voix … mille ans … et pourtant je m’accroche à ce rituel …

Le téléphone sonne (rien à voir avec l’émission de radio quadragénaire). Je décroche.

— Allô ?
— C’est Paul ?
— Lui-même.
— Je me présente, Paula …
— Stop ! Je ne suis pas intéressé par votre pub téléphonique interdite selon l’article L. 223-1 du code de la consommation…
— Mais je suis Paula, Paul ! tu ne me remets pas ?
— …
— Paula ! nous étions tous les deux en intérim dans une boîte de fournitures de bureau au sud de la ville.
— Oui, possible … et que puis-je pour vous ?
— Tu me vouvoies ?
— Je ne suis pas très frénétique, ce soir…
— T’as le vilebrequin du cerveau qui déraille, Paul ?
— Pourquoi riez-vous ?
— Fais pas l’innocent de celui qui ne me connaît pas, hein ! T’as peur ?
— Ce mot m’est inconnu…
— Vantard !
— Demain tu seras morte, tu le sais ?
— …
— Tu ne dis rien ?
— …
— Tu vas mourir d’une occlusion … et tu auras le choix … de l’occlusion …
— T’es vraiment un grand malade toi…

Elle raccroche. Mal polie.

Et je souris. Pour une fois que je peux annoncer une mauvaise nouvelle directement car la vie n’est pas toujours rose, pour nous les suppôts du maître Satan …

© Max-Louis MARCETTEAU 2020

Qui est muet en juin…

Oeuvre de Albert Henry Collings

Oeuvre de Albert Henry Collings

Défi de lateliersouslesfeuilles : A vos claviers #8 :


« Le temps qu’il fait en juin le trois, sera le temps de tout le mois. » Un dicton à la noix, je vous jure, que j’ai entendu y a peu à la radio de mon quartier.

Je suis à mon balcon, et il fait un temps normal de mois de… mai. Les nuages sont ceux habituels avec leurs « accents » du lieu. C’est dire qu’il y a fidélité de clonage dans cette petite partie du ciel dont j’ai accès de visu.

Juin ou pas juin, les dictons sont aussi malicieux que la voûte céleste dans un épais nuage qui se croit être en hiver alors qu’elle n’a pas bougé d’un iota comme soudée par un étain de bonne tenue. En fait, les dictons sont un peu comme l’astrologie. On y croit ou pas et Saint Thomas peut faire une croix sur son autobiographie, en tout cas cela ne vaut pas un clou de jésus (entreprise de métallurgie à une certaine époque aussi reculée que les traces d’un écrit laissé sur la morsure d’un bois dit « bon sang de bois » gravé par un scribe nommé parait-il Sinsuère).

Quoi qu’il en bois… qu’il en soit, il y a dans les dictons de l’intox. De fait, le temps d’hier au temps d’aujourd’hui on a tous pris pour argent comptant ce genre de propos. Il faut aujourd’hui s’insurger et porter l’affaire en haut lieu. Mais, je sais pertinemment que la cause est déjà entendue par des… sourds et le muet de l’histoire n’en dira pas plus car comme le fameux dicton qui le prouve :« Qui est muet en juin, ne peut rien dire le mois suivant ».

En fait, le dicton d’un lieu n’est pas généralité. C’est une grande leçon d’humilité. Et si parfois le dicton est une vérité déguisée en mensonge, il se plaît à rester de génération en génération comme le baobab de service. Et je ne veux pas finir ce modeste « pamphlet » sans citer ce fameux dicton qui ne veut rien dire dans nos contrés mais qui existe comme le bois à la cendre, le nuage à la goutte : « Lorsqu’en juin on voit sa fin, Saint-Martial souvent lave le chemin. »

© Max-Louis MARCETTEAU 2018