J’ai le drame sous le nœud !

Photographie Iotop 2023

Agenda Ironique Juillet


Deux branches, une de chêne et l’autre de hêtre, quelque part entre ici et là-bas sur le revers d’une route non reconnue et absente des mémoires par effet.

— J’ai le drame sous le nœud !
— Prends de l’anticatastase !
— Ne fais pas l’idiot en prenant cet air de pub des années 80, hein ?
— Tu brindilles trop de la feuille. Vive l’été que tu te mettes au vert !
— Bravo, l’humour !
— Descends de ta hauteur ! Tu y verras l’herbe plus verte et ton albédo pare-soleil de moins à réfléchir sur ta condition !
— Ce n’est pas l’ombre d’une nervure qui va t’étrangler de ce conseil, nom d’un gland !
— Tu conçois ton drame comme une fin en soi, alors qu’il te suffit d’effeuiller la perspective négative.
— Éclaire ton propos.
— Par extension coupe une subdivision qui t’empoisonne…
— Pour devenir un rameau ? Jamais, tu entends… jamais.
— C’est toi qui vois.
— Je ne vais pas essayer !
— T’as le pentagone d’hiver qui t’étouffe, pour sûr !
— Ce n’est pas le poids de mon manteau blanc qui me pendra.
— Tu finiras par craquer de tout ton poids de contradictions, vieille branche !
— Tu vois que je ris, que je ris, idiot !
— Toute attente ne fait qu’augmenter ton mal-être…
— Très drôle une nouvelle fois !
— Ne refuse pas mon aide et « ne pas être le pingouin qui glisse le plus loin » pour se noyer.
— Le noyer ? C’est une blague à la noix ?
— Presque, tu sais, j’en fais à la chaîne…
— Là, je reconnais… je suis scié…

Et là branche, de se secouer de rire, que son trop-plein de neige la soulage de son spleen… et casse…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

Au garde-à-vous de la déchéance

Photographie Iotop 2023

Oulimots


Quelque part sur une terre non promise, un homme à un autre homme :

Sauvage ! Vous êtes en ce mot l’incarnation d’un tout au sang chargé…
— Oh ! ça va, ça va, ne vous éreintez pas en une fumeuse diatribe, hein !
— Ma seule colère que je puisse encor exprimer dans ce théâtre de vie à la scène bondée de résignation…
— Vous faites courir votre salive à vos lèvres qui ne demandent qu’à boire une belle eau.
— Votre cynisme est épouvantablement injurieux et déplacé.
— Il est bientôt minuit et le soleil peine à se coucher à cause de votre passion à vivre.
— Je ne plastique pas ma vie à tenir mon prochain au garde-à-vous de la déchéance.
— Quel est ce mot plastique ?
— Il vient d’aussi loin que je suis près de vous.
— Ironique ?
— Non, explicite.
— Vous êtes en votre ministère la Loi. Ici vous êtes à la mienne.
— Il n’y a pas une autre surprise ?
— Assez ! Je vais vous clouer le bec…
— N’est pas qui veut… Jésus

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

Tu sais me préparer à ta sauce…

Photographie – © Iotop 2022

Oulimots


— Alors, tu tiens à ta conserve ?
— Elle a son titre de noblesse…
— Et mon pain complet bio, c’est du poulet d’élevage ?
— J’ai choisi mon camp camarade de l’alimentation au grand air saturé de bonnes intentions et du rhizome nature à la terre aux pesticides exilés.
— Bigre ! tu resteras un célibataire de l’assiette indélicate et malhonnête…
— Tu insinues que je me prostitue pour l’agro-alimentaire ?
— Je ne te le fais pas dire, c’est une oie que tu gaves.
— Quand tu auras fini de me montrer ton côté sombre, je veux bien goûter la douceur de ton caractère.
— Il est vrai. La matinée avance, et te cuisiner chaque jour sur ce sujet alimentaire est peine perdue.
— Enfin, des paroles en un bel écho pour le coup.
— Et si tu faisais… disons… ton sauvage… là, sur ma table ?
— J’aime en toi cette clé primitive du langage qui rehausse en moi un tout autre organe.
— J’aime aussi t’entendre par tes mots à vivre… viens à moi mon berger des hautes montagnes… mon alpage à ton sceptre…
— Tu sais me préparer à ta sauce…
— Et de la tienne en savourer tout à ma bouche…
— Viens à moi, je suis ton Saint-Jean…
— Et moi, ta Sainte-Audrey…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

Conversion d’un tout en rien

Photographie © Iotop 2023

Oulimots


— Il s’appelle comment ?
Rubis.
— Rubis ? Étrange. Il ne brille pas d’un charisme à la Gary Grant. Et sa tête de chef instituteurs à la Mikhaïl Ivanovitch Kalinine ne me dit rien qui vaille.
— Ah ?
— Regarde. Il est muni de l’option : colère; il doit ressembler à un rapace d’une envergure à faire pâlir le vautour de service.
— Ah ?
— En clair, ce n’est pas le style à rameuter une foule.
— Ah ?
— Même le désert de Gobi en aurait peur.
— Ah ?
— Remarque, il faudrait attendre… s’il change. Un effet de l’inattendu. Une boulette de viande qui se transformerait en un bon rôti chevalin.
— Ah ?
— Tu sais, la vie porte en elle des regards qui nous donnent le mot : miracle, même en dehors de Lourdes.
— Ah ?
— Eh oui. Je pense au dédale qui nous mène où nous sommes, tous, et c’est bien le mot : somme qui nous fait ce tout et qui au moment voulu fera conversion en un rien.
— Ah ?
— Je me demande quand même si ça ne fait pas désordre de l’avoir invité, ce balbuzard ?
— Ah ?
— Je le vois bien tourner autour de nos carcasses d’un cercle à un autre et piquer sur l’un de nous.
— Ah ?
— Tu ne crois pas ?
— Et si tu parlais moins… c’est mon père…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

Nuages à l’humeur taupe

Photographie © Motop 2023

Agenda Ironique Mai 2023


« L’aurore sortait de l’océan sur son char de roses », la tête enflée par un bandage de nuages à l’humeur taupe.

— Quelle heure ?
— Il est trop tard.
— Qui sait !
— La Manière des temps ont fait coalition contre nous.
— Trahison !
— On est condamné.
— Pas tout à fait, si La Valeur du Premier temps peut nous suffire, non ?
— Oui et non.
— Si l’incertitude est acceptable par oui/non, l’échelle de notre temps, à ce niveau du maintenant, devrait nous atteindre avant le chaos.
— Tu crois que Gróa…
— Elle s’est enfuie, la garce !
— Les hommes ne seront-ils que des hommes ?
— À défaut d’être autre chose comme de la famille du marsouin… oui, notre nom nous définit comme périssable sans recours.
— Nous sommes que le fruit d’une possession, c’est ça ?
— Un trichobézoard sur la route de l’évolution qui ne l’a jamais digérée.
— J’ai un rot qui vient et pas du fond des âges.
— Soulage-toi, soldat !
— Brôoooaaaaaaaaaaaaa
— Et si la solution était là ?
— Qu’est-ce ?
— Si le temps n’était qu’un vide à dégager de notre vie pour se libérer de son carcan ?

À ce moment-là, les jumeaux se font accoucher…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

J’ai de la graine de citrouille en moi

Photographie Iotop 2023

Agenda Ironique de Mars 2023


La dune a ses chardons comme le nudiste a ses plages. Entre piquer la peau et les yeux, la nature fait son naturisme comme l’animal copule à l’aise dans le champ prédisposé à se nourrir lui-même et les autres avec le pesticide goguenard entre le pissenlit et l’amourette frivole car de tous les amours de la terre celui de l’humain est bien le seul qui se prend le bourrichon entre le cœur et le cul, choisis ton camp camarade syndiqué de l’extase.

Bref, deux plantes toutes racines bien godichées s’épanchent entre le demi-soleil borgne aux nuageux distancieux sur un terroir encore nature par sa nature dite sauvage désigné par des yeux torves :

— Je vais partir !
— Partir ?
— Je m’arrache !
— Tu sèves n’importe quoi ma pauvre.
— Non, j’ai de la graine de citrouille en moi pour devenir carrosse et m’en aller voyager sur les chemins boueux de la reconnaissance de terrains épicés d’aventures aux hasards rigoleurs…
— Dis-moi tu ne serais pas amoureuse du fameux PTP ?
— Du Pissenlit aux Trois Pouvoirs? Tu rigoles !
— Alors, je me demande quand même si cette idée ne t’ait pas venue à la première sonnerie de ta pendule atomique de ton intrinsèque génome déviant ?
— Moi, madame, je veux ouvrir ma corolle au monde !
— Pfff !
— Ça vous désarçonne, hein ?
— Vous êtes bête! Quand le réveil de votre erreur va vous flanquer entre les feuilles, vous allez déposer illico votre valise, c’est moi qui vous le dis !
— Rabat-joie, moi qui suis toute à mes idées de connaître possiblement… le grand amour…
— Tu dégoises grave de la tige au pistil. C’est t’y bien le bout du printemps et son goupillon qui t’houspille les sentiments, ma Rosie, ma pauvre ?
— Qu’importe, enfin j’éclos de l’intérieur que mon extérieur est radieux, je vais enfin jouir…
— Hop-là !!!
— T’as la corolle collée-serrée jusqu’à l’étouffement de ton désir, tu ne veux rien entendre de mots d’émerveillement, du vertige du ressenti sensuel…
— Pfff !!!
— Tu m’en veux de rêver, d’être moi-même.
— Tu vas déchanter au quart de la prochaine lunaison.
— Qu’importe, le peu n’est pas le rien. Et je prends ce tout du peu. Et avant de déchanter, il y a : chanter.
— Nigaude, tu seras fanée bien avant.
— Je sens mon jour de gloire arriver.

Et juste à ce moment la bouche d’une chèvre, broie les deux inconnues…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

La couleur bandit

Photographie Iotop_2023

Oulimots


— Tu as la couleur d’un bandit
— ???
Toujours à détrousser le Sentiment le plus précieux…
— Va tondre ta pelouse, tu auras les idées plus terre-à-terre.
— Tu es une machine à broyer le cœur honnête.
— Il n’y a pas de cœur honnête, il y a des circonstances d’honnêtetés.
— Une provocation ? Que veux-tu ? Me voir mendier sur un autre territoire pour recueillir quelques mots d’attention et les voir faner dans la vase du souvenir ?
— Tu brodes à merveille un scénario par anticipation erronée…
— Je ne brode rien, je déborde vers mon incertitude.
— Tu as le sentiment de peau mannequin !
— Je suis quoi ?
— Une rencontre entre deux feux de signalisation aux desseins de mon destin, sans doute.
— Rien de plus ?
— Bon, maintenant si tu allais tondre ? hein ?
— Oui, je me prépare pour un autre… mon gazon…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

L’errance qui ronge son os

Photographie Iotop2023

Oulimots


— … Dieu a enfanté ! Dieu a enfanté ! …

— Il n’est pas un peu dingo ?
— Ses homélies sont avant-gardistes.
— Underground liturgique.
— A défaut d’être séminales.
— Ne ris pas !… tu vas nous faire remarquer.
— Il veut se refaire une population à la nef, quand celle-ci n’est que de bois au prie-dieu vide que le sens même nous renvoie à la pensée du non-être et que le bois dont ont fait les hommes manque à l’appel d’une consécration à ne plus être seul…
— Ce bois unique de chair qui a fait nos grandes heures et qui se décompose au moindre souffle de l’incertitude à l’absence d’une éternité devenue poussière…
— … et de sang possédé par du médicamenteux, chimie diabolique à nous retourner… le sang…
— Il manquerait qu’Ils inventent un substitue…
— Pas de pitié pour ceux qui se traînent dans les ombres de l’occulte.
— Sont-ils nombreux ? Regarde… ce que nous sommes devenus ! impropre à la consommation des peurs ancestrales. Une vie de chien a l’errance qui ronge son os… ce n’est pas de veine…
— Elles ont changé de camp, si ce n’est de visage.
— La rengaine du changement climatique, les guerres, l’inflation, le porno, les blockbusters, etc.
— L’Enfer nous rit au nez, c’est bien simple !
Arrêter ce à quoi nous sommes destinés ? Faire une formation ?
— Non, non… pas de quart, de demi-tour, ou tour entier… restons fidèles à nos préceptes antédiluviens… à qui sait attendre…
— Tu as raison ma Reine, retirons-nous de cet endroit et allons sucer nos réserves d’humains dans les soubassements de cette église… j’entends encore quelques cris… bien vivants…
— Viens à moi… mon vampire d’amour…. régalons-nous et… au pieu…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

Le bonheur est malsain

Photographie Iotop 2023


Deux parallèles discutent…

— … j’ai ce goût d’inachevé.
— Ça ressemble à quoi ?
— Une disjonction du Temps à l’intérieur de Moi.
— Tu as … un Moi ?
— C’est une assertion audacieuse de l’avouer à la perpendiculaire d’un ressenti, à l’angle d’un soupçon d’une certitude, à l’intersection d’un relief à peine perceptible d’un doute à l’ombre du souffle de l’onde plébiscité par ricochet…
— N’en jette plus ! N’empêche que c’est tout de même tendancieux…
— Ma sincérité n’est pas vérité à ton endroit à tout moment du discours, la défaillance peut surgir.
— Je m’étonne de ne pas ressentir… ce Moi.
— Rien n’induit de part et d’autre une quelconque possibilité de lien.
— Et pourtant, à la ressemblance…
— … la dissemblance…
— … nos latitudes font cohérences…
— … nous sommes des lignes…
— … tête-à-tête perchés à l’encre…
— … la tache, seule, nous décloisonne.
— On est le contraire du reflet quand le miroir des mots froisse… ainsi, le bonheur est malsain…

© Max-Louis MARCETTEAU 2023

De là où je parle…*

Photographie Iotop 2022


— Tu es une Passeuse d’Anges.

— Qu’est-ce ?

— Un mystère.

— Un mystère ?

— Une couleur.

— Une attirance ?

— Une convergence de Temps.

— Un résumé de Vie ?

— Le dévoilement d’un possible, autre.

— Il faut une clé ?

— Tous en nous, avons cette clé.

— Est-elle saisissable ?

— Peux-tu saisir le vent dans ta main ?

— Comme la parole… Alors, tout, nous file, entre les doigts ?

— Elle sera à notre seuil, éclairée… tu es la serrure… pour ceux qui te reconnaissent…

© Max-Louis MARCETTEAU 2022

* Isabelle T.

Au rayon vert deuil

Photographie Iotop 2022

Agenda Ironique Février 2022


— Y a quelqu’un ?
— …
— Vous êtes là ?
— …
— Je sais que vous êtes là ! Ne faites pas la bête, hein ?
— Si je veux…
— Ah ! Vous boudez ?
— On n’a plus rien à se dire, vous savez…
— Pas moi ! J’ai plein de choses à vous dire !
— Parlez-en à votre cœur, lui, sera vous conseiller…
— Mon cœur est bien là où il se trouve.
— C’est pas lui qui vous empêche de dormir ? Avouez !
— …
— Ce n’est pas la peine de me réveiller pour ne plus vous entendre !
— Oui… c’est vrai… c’est lui qui m’empêche de dormir… ça vous va, cette confidence ?
— C’est bien ce que vous êtes venu chercher, non ?
— Je ne comprends pas ?
— Vous êtes à ma recherche par cet intérêt de vous confier à moi pour que l’autre, ce cœur, que vous soupçonnez d’ingratitude, entende. Ne niez pas !
— Vous êtes pénible.
— Alors, laissez-moi où je suis au lieu de m’asticoter et vous servir de moi pour votre intérêt tout personnel.
— Oooooh ! Il y va de votre intérêt aussi, hein ! Bon ! Alors, ne soyez pas si revêche et prenez votre part qui est aussi la mienne. Arrêtons de nous combattre et prenons acte que nous sommes dans le même bateau !
— Le même corps…
— Oui, oui… on va pas chipoter…
— Eh bien, je chipote, un corps ce n’est pas un bateau !
— Enfin, il est constitué de quatre-vingt-dix pour cent d’eau et le reste de la carcasse c’est en dur… donc, si nous extrapolons c’est bien une carcasse qui navigue sur l’eau, là !
— Extrapolez, extrapolez, mon bon, je ne vous écoute plus, je ferme les écoutilles !
— De toute façon…
— De toute façon ?
— Il est trop tard !
— …
— Il vient de mourir…

Ainsi, le soi et l’âme du soi s’envolent dans l’éther du soir au rayon vert deuil qui ferme à cet instant son rideau… et le linceul de service couvre un corps … sans cœur…

© Max-Louis MARCETTEAU 2022

Autres secrets sans être agent

Photographie de Miguel Campos

Sur une idée de Lazuli Biloba le 08/12/2021


— Oh ! Y a quelqu’un ?
— Qu’est-ce ? dit Secret de derrière la Porte.
— Je suis un secret.
— Et ?
— Je souhaite être des vôtres.
— C’est quoi ton secret ?
— Je ne peux le divulguer.
— Bien dit. Il porte sur quoi ton secret ?
— Secret d’État.
— Diantre, voilà qui est alléchant. Tu peux m’en dire davantage ?
— T’avouer que je suis détenteur d’un secret d’État, c’est déjà m’exposer et me mettre à jour.
— En effet, te voilà indéfendable.
— Indéfendable, indéfendable, c’est à voir, dit à voix haute Secret de Polichinelle qui s’impose.
— Ah te voilà ! toi, dit Secret de derrière la Porte.
— Messieurs, dit Secret d’État, de la retenu, l’Esclandre n’est pas bien loin.
— SILENCE ! s’exclame le Mur à des Oreilles.
— Bon alors, on va faire court, dit Secret de derrière la Porte, on va chercher le doyen des Secrets d’État, il jaugera de ta demande.
— Je suis là, dit Secret d’État doyen.
— Je te croyais sourd.
— Oui, à toute divulgation.
— C’est d’un drôle, murmure le Mur à des Oreilles.
— Alors, jeune secret d’État, tu es porteur d’un quelque chose d’important ?
— Tout à fait.
— Dis-moi tout.
— Ici ? à l’écoute de tout cela ?
— Veux-tu venir au Jardin Secret ?
— Ce n’est pas le meilleur confessionnal.
— Ne t’inquiète pas, Secret de Fabrication a bien fait les choses.
— Bon.
— Alors, dis-moi.
— Eh bien, ce secret c’est …
— C’est ?
— Eh bien…
— Oui ?
— C’est comment… manger proprement… un mille-feuille…

© Max-Louis MARCETTEAU 2021

Je suis en pyjama …

Henri Matisse – La conversation – 1908

Agenda Ironique d’Avril 2021 – (hors délai)


— Alors ?
— Quoi, alors ?
— Les mains dans les poches !
— Je suis en pyjama…
— Qu’importe, tu es chez moi …
— Mon défunt père me disait, très justement, à propos d’une voisine acariâtre : « cause toujours, tu m’intéresses ».
— Je ne suis pas une voisine mais ta femme !
— On ne gagne pas à tous les coups…
— Tu me provoques ?
— C’est le destin qui un jour m’a convoqué pour te rencontrer…
— Tu es ignoble !
— Non, fatigué tout simplement …
— Ton lit t’attend.
— Oui, mon lit, mes rêves, ma nuit, et puis mon journal du matin … et toi, ma femme, qui n’attend plus rien…
— J’attends que tu quittes mon champ de vision.
— Pour une fois que je voulais te dire : bonsoir …
— Je ne te demande rien …
— C’est vrai … et pourtant …
— Et pourtant ?
— Pourquoi me gardes-tu ?
— Peut-être parce que tu fais partie… des meubles…
— Te voilà sentimentale ? Belle confidence …
— Et toi … pourquoi restes-tu avec moi ?
— J’ai le gîte, le couvert, l’argent de poche, quelques menus plaisirs …
— Nous sommes lâches …
— Non, nous sommes … indécents …

© Max-Louis MARCETTEAU 2021

Je viens vous jardiner ma douce amie

Photographie maurorobi66 – Venice Carnival

Blog Émilie : récolte 21.05


— Vous êtes bien tendre mon ami, ce matin.
— Je viens vous jardiner ma douce amie.
— À mon plaisir d’avoir accepté au bal votre émeraude ?
— À votre rayon de lumière qui jaillit de vos yeux entre vos feuillages en ce lever désirable.
— Je ne suis pas un arbre, grand vaurien.
— J’attends de vous un renouveau de notre amour cendré.
— Le Phénix n’est pas à l’ordre du jour et votre espérance me fait sourire.
— Je suis encore cette graine qui germe d’un amour vrai en votre territoire.
— J’ai bien peur que vous deviez vous contenter de vous-même…
— Eh bien, voilà un soufflet qui me contrarie jusqu’à mon chapeau.
— Votre chapeau est aussi de la partie à danser avec votre caractère ?
— Vous sous-entendez que j’ai pris un coup de soleil ?
— J’entends parfois que vous avait à la place de votre cerveau de la mousse.
— Il faudrait me ménager… à l’occasion.
— Allez courir la gueuse pour vous distraire alors que moi je ne suis qu’une insatisfaite et une drôle de mine

© Max-Louis MARCETTEAU 2021

Votre œil noir des dimanches sablonneux

Photographie de Oleg Kornilov – intitulé Woman is watering flowers in a garden

Blog Émilie : récolte 21.04


— Qui est-ce ?
— C’est un auteur.
— Pourquoi il ramasse des feuilles ?
— À broyer des mots aux feux des lignes, je l’ai amené par la douceur à l’engager comme jardinier.
— C’est un bon ouvrier ?
— Il ne cabosse pas mes plates-bandes… il est au moins bon à quelque chose.
— Ainsi vous le maîtrisez.
— Tout à fait. Il me doit deux manuscrits, le bougre !
— Il faut bien se payer.
— Eh oui, quand on considère qu’il n’a pas toute sa tête…
— Qu’est-ce à dire ?
— Il a voulu marchander avec une tablette de chocolat… son contrat.
— C’est curieux, en effet.
— Curieux ? Il avait retiré l’emballage… cela ne se fait pas… qu’est-ce que vous en pensez ?
— …
— Ne me regardez pas avec votre œil noir des dimanches sablonneux.
— Je vais paraître suranné, ou mal convenu… mais… vous semble-t-il être conscient de votre état ?
— Et vous-même ?
— Moi-même ?
— Oui, vous-même ?
— Je ne comprends pas…
— Vous prenez le risque de déguster
— De déguster ?
— Un câlin ?
— Euh… je suis un peu perdu dans vos propos…
— Vous voyez… vous semble-t-il être conscient de votre état ?
— J’avoue que j’ai un tantinet chaud en votre compagnie…
— Il faudrait vous prescrire quelques moments en compagnie du jardinier.
— Et pourquoi ?
— Pour vous aérer l’esprit, tout simplement… une pâtisserie ?
— Euh… avec plaisir
— Vous serez très bien parmi nous, je vous le dis, dans cet établissement… mental…

© Max-Louis MARCETTEAU 2021

Tu es perméable comme le beignet dans la friture

Photographie Iotop 2021- Oudon

Blog Émilie : récolte 21.03


Annulation ?
— Eh oui …
— Je m’élève contre …
— Confrontation ?
— Frustration !
— Alors, organise avec toi-même ton carnaval.
— Pour masquer ma frustration ?
— Non. Pour te mettre hors d’atteinte de ce monde.
— Hors d’atteinte de quoi ?
— De l’effervescence mondiale… du demain entre deux eaux (et pas le village des Vosges) …
— Tout est à brûler !
— Au contraire, tout semble se reconfigurer !
— Que m’importe, l’angoisse me conseille fortement, me presse le ciboulot, et son jus m’empoisonne.
— Tu es perméable comme le beignet dans la friture… à boire trop de médias toxiques, voilà où tu en es …
— C’est vrai… je dois stopper ces avalanches de morts, de complots, de conflits, de menaces, de statistiques, de guerres …
— Et toute la bêtise faite homme
— Et femme
— Aussi !
— Bon, je vais accueillir aujourd’hui mon nouveau moral tout neuf !
— Excellent !
— C’est fou comme tu me fais du bien ! Tu sais ça ?
— Euh … oui … bon …
— Tu me revigores … tu sais oser me bousculer … et j’aime ça …
— Bon, arrête ton char
— Tu es ma couleur de vie ! Tu sais ça ? Mon Amour !
— Je n’aime pas les compliments, c’est moi qui vais avoir le moral en dessous de la ligne de flottaison…
— Et si je t’apportais réconfort, là, maintenant ?
— Qu’est-ce ?
— Goujat ! Regarde ! Cette belle culture du bon de toi en récompense … viens à moi, prends moi, maintenant, de corps… en ton carnaval !

© Max-Louis MARCETTEAU 2021

Ce vaisselier centenaire me scrute

Ce vaisselier centenaire me scrute

Oeuvre de David-Germain Nillet – La soupe.jpg

Blog oulimots contrainte écriture


A l’heure de mon repas journalier ce vaisselier centenaire me scrute de ses yeux vitreux … et ce canapé… je l’entends crier à chaque fois que les griffes du chat lui triture la caouane couleur bleue de son teint …

Ma soupe est chaude et je réfléchis la tête … de la cuillère dans le bouillonnement … elle ne souffre pas … elle …

La lampe du plafond, allumée, la vague d’un tungstène dans l’âme :

— T’as un souci, Paul ? me dit-elle.
— Je souhaite l’oubli.
— Tu souhaites de l’aide ?
— Non.

Et ma cuillère fait dos rond… c’est louche …

— Tu fais ta forte tête ?
— …
— Ne me réponds pas !
— J’en ai ras la soupière …
— Et moi ras l’assiette creuse de tes bouderies …
Cesse ! .. de me mordre les rebords !

Cela dit, elle n’a pas tort. J’ai le dentier du haut qui racle et qui râle en fond de gorge comme un écho.

— Je te côtoie tous les jours et …
— Précise, dit la cuillère en se retournant et me fixant le plein de son questionnement à ras le bord.
— Tu vas retourner au tiroir.
— Tu es abject !
— Laisse-moi exister au lieu de te plaindre chaque jour.
— Tu vas fricoter avec une autre…
— C’est sûr !
— Goujat !

Et … je l’ai noyée dans sa jalousie pour l’éternité.

© Max-Louis MARCETTEAU 2020

Un dernier vœu avant le premier saut ?

Lac_Abraham Photo de Luis Arevalo

Blog Sabrina (j’ai fait le choix d’une des trois consignes )


 

Deux hommes en haut d’un pont entre deux montagnes, et un lac en contrebas.

— Tu sais quoi ?
— Non ?
— Je me demande si l’eau est froide.
— Ce n’est pas de l’eau, c’est du méthane.
— Ah ? C’est un nouveau procédé ?
— Tu pouvais choisir.
— Momifié à vif ou gelé et réchauffé par intermittence jusqu’à ce que tous les membres tombent comme de la lèpre … quelle importance.
— Rien ne sert de courir, il faut mourir à point !
— Ça te faire rire ?
— Pardon.
— Tu es le bourreau officiel sur ce territoire, alors je comprends que tu n’es pas là pour verser des larmes.
— Un dernier vœu avant le premier saut ?
— Tu sais pourquoi je suis méchant ?
— Non ?
— Parce que la vie a été injuste avec moi.
— Cela m’étonne.
— Je suis né avec une «cuillère en argent», je n’ai pas eu à traverser la rue pour trouver un job, tout le monde m’aimait, même la mamie que j’ai ébouillantée avec sa marmite de soupe…
— Et ?
— C’est devenu au fil du temps insupportable … adolescent, avec ma tête d’ange, le mot amour se collait sur la langue des filles qui voulaient s’approprier mon corps comme d’une marchandise, comme un caprice…
— Être aimé, c’est beau non ? Quand une partie de l’humanité se demande si l’amour n’est pas une arnaque.
— C’est là que j’ai commencé à tuer. La première, dans le sous-sol de la maison de mes parents.
— Pourquoi n’as-tu pas simplement refusé ses avances ?
— Beaucoup d’autres avant… avaient essayé de m’embobiner. J’avais lutté. Mais celle-ci m’avait carrément joué une grande scène du genre guet-apens…
— Elle était moche ?
— Non, non …
— Une erreur de jeunesse …
— Oui. Je n’ai pas été soupçonné.
— Comme quoi, tu as été verni.
— Les années ont passé. Je cédais aux femmes qui avaient de l’argent. J’en tuais quelques-unes quand elles étaient pots de colle.
— Pourquoi tu me dis ça ? Ta condamnation n’a rien à voir avec ces femmes.
— Il m’aimait, je l’aimais, il m’a trahi … je l’ai tué…
— Et d’une manière moyenâgeuse …
— On ne fait pas mieux, actuellement.
— C’est vrai mais c’est pour la bonne cause, l’exemple.
— J’avoue … à cet instant …. que … je n’ai jamais su aimer. Pour moi … c’est une révélation.
— Trop tard.
— Oui, trop tard…

Et le solide bourreau le prend à bras-le-corps, et le jette, par-dessus le garde-corps du pont, dans le lac de méthane en ébullition à moins 161°.

© Max-Louis MARCETTEAU 2020

Le Bonheur, le cœur bien propre sur lui


Teille Mouzeil sculpteur Jean-Claude Lambert
Photo ©Iotop2019

Agenda Ironique Décembre 2020 : Flyingbum (Merci à Laurence de l’idée d’écrire un dialogue)


Il sonne : je n’ouvre pas. Il sonne : je reste muet. Il sonne : il m’énerve. Il sonne : je fais la sourde oreille. Il sonne : je prends l’apéro…

Le Malheur est à ma porte (à ne pas confondre avec Mahler). Il souhaite être invité. Je dis : non. Qu’il aille voir si j’y suis… ailleurs. Il me harcèle tous les jours du calendrier Grégorien.

Le Bonheur est chez moi et nous prenons le bon temps, foutre-Dieu ! Et cette calamité qui vient vers moi.

— Ouvre-moi !!! crie-t-il
— Rien à faire ! Va te faire embaucher ailleurs !
— Tu es sur ma liste !
— Sûr que ce n’est pas une liste de courses ! répond le Bonheur qui sirote quelques plaisirs de ma table.
— Tu ne peux pas passer ton tour !
— Et pourquoi pas ? réponds-je
— Le Bonheur, il le sait, lui !
— C’est vrai que tu le sais, toi ? Rétorque-je au Bonheur les yeux malicieux.
— Sûr que je sais !
— Alors ?
— Pour faire court, depuis la mise en ménage de la Béatitude et du Désastre on a décidé de couper la poire en deux comme on dit par chez nous. Chacune de nos obédiences se devait de réagir. Ainsi, il n’y a pas embarras de choix, sauf exceptions, les hommes se soumettraient au même poids de malheurs et de bonheurs, tout cela ratifié avec le Destin et son épouse la Fatalité.
— Dites-moi que je rêve ?
— Non ! s’exclame le Malheur qui tambourine à ma porte. (la sonnette ayant rendu l’âme… c’est un signe).
— Il va me bouillonner ma journée, dis-je en marmonnant, me tartinant une crêpe de confiture à l’abricot.
— Il va sans dire que je dois courber l’échine, m’avoue le Bonheur avec une moue qui n’est pas s’en rappeler les heures graves de l’épi de pain durcissant dans la huche du même nom.
— Tu veux faire mon malheur, c’est ça ?
— Non, non, répond le Bonheur, le cœur bien propre sur lui.
— Tu me condamnes !
— Ne soit pas si futile dans ton discours. Ce moment passé avec moi est à garder précieusement dans ton âme. Et puis, un petit malheur, ce n’est qu’une petite dose d’arsenic à digérer.
— T’es un comique, Monsieur Bonheur, ça fait plaisir à entendre, dit le Malheur qui vient d’entrer portant la Détresse en bandoulière.
— Mais …mais comment … ? dis-je au Malheur, avec toute la surprise, la déconvenue cousue sur mon visage.
— Tu sais, je reste poli en sonnant ou frappant à la porte, mais les gens ne veulent pas me voir, m’ignorent comme la Misère qu’il croise et tourne le regard vers l’autre trottoir ou font semblant de zyeuter leur téléphone portable.
— Alors, tu entres par effraction !
— Holà ! Doucement ! Je préviens, j’annonce, j’avise, j’informe, j’alerte, il m’arrive même de mettre la puce à l’oreille …
— Eh oui, il est honnête, le Malheur, concède le Bonheur qui vient de se lever et de boucler son baluchon.
— Je t’en conjure, Bonheur, reste !!! crie-je
— Allons, un peu de courage … que diable, souris béatement Bonheur.
— Et si vous restiez tous les deux ? Hein ? Avec moi, là … c’est une solution convenable.
— Tu tentes de négocier l’innégociable ? me répond Malheur qui dépose son sac de poisons à ma table que le pain se rassit à vue d’œil …
— Bon jour chez toi, me lance euphorique, Bonheur en franchissant ma porte.
— «Retenez-moi… ou je fais un malheur !»

© Max-Louis MARCETTEAU 2020

Cinquantenaire d’une belle tournure de corps

femme cinquante elegante chapeau -Photographe inconnu
femme cinquante élégante chapeau
Photographe inconnu

Blog oulimots contrainte écriture


Il lui semblait avoir une tête de potimarron après l’ivresse de la soirée qu’il venait de passer dans le château de la belle au bois dormant surnom de la comtesse cinquantenaire d’une belle tournure de corps qui l’avait invitée alors qu’il faisait le poireau devant un cinéma suite à un rendez-vous pris sur un site web de rencontres qui s’était avéré être un lapin …

Il avait des souvenirs par flashs depuis qu’il était sous la douche un peu fraîche comme la nudité de ce matin dont la rosée s’éveillait à l’orangé d’un horizon bancal et défiguré par les nuageux cumulus baluchonnés en voyageurs éphémères qui n’attendaient pas à se faire enguirlander par les nimbostratus maous…

Il faisait glisser son savon bio à la courgette sur sa peau délicatement robuste comme une belle carrosserie de mustang qui devenait verte par effet d’une composition instable et ne s’étonna pas de ce changement au climat de son état entre deux eaux, qu’il se rappelait que la comtesse l’avait bousculée à la sortie du ciné après la séance de quatorze heures dix, lui qui faisait le pied de grue et que matait une aubergine

La pomme de douche en main, l’eau se déversait d’un corps à corps avec lui-même se découvrant un moment de bonheur qu’il se demandait comment il avait cédé aux avances de la comtesse si ce n’était son allure bon chic bon genre avec son trench-coat beige et sa robe fourreau poivron jaune clair unie avec poches ou son sourire en coin, ses yeux de biche ou tout simplement son parfum N°5 ou peut-être bien sa voix qui l’avait envoûté…

Il faisait ses premiers pas à l’extérieur de la douche italienne que la comtesse se présenta toute … inattendue qu’elle lui claquât sa fesse droite qu’il rougit comme une tomate au milieu d’un été possédé d’une sécheresse à dénuder les écorces des arbres, qu’il n’avait pas, ni feuille de vigne ou de salade seulement sa main gauche pour cacher sa modeste verge :

— Alors, mon chou, on fait sa midinette ? Hier au soir, tu avais un meilleur répondant !
— Hier au soir, était un autre jour. Aujourd’hui, je ne veux pas me faire déguster par une mante religieuse.
— Et si j’étais une veuve noire ?
— Raison de plus pour ne pas contraindre ma vie à subir tes démons de midi.
— Goujat !
— Non, c’est un constat !
— Profite au lieu de constater, juger, condamner … à la barre des témoins … faire la fine bouche, dénaturer de ce que tu as joui, déposséder ce que tu as possédé toute une nuit …
— Holà ! Je suis d’une nature délicate moi ! Je souhaite encore profiter de contrées inconnues et ne pas me consacrer à un seul territoire !
— Tu as la langue bien pendue, autant que pour pratiquer un cunnilingus.
— Un compliment ?
— Un compliment car je ne suis pas avare moi !
— Holà ! Doucement, ! … une nuit avec toi c’est Austerlitz devant les Russes, c’est Mohamed Ali devant George Foreman … bref, je suis essoré ! Ok ?
— Et moi, si j’en redemande, beau goujat ?
— Je déclare forfait !
— Immature !
— Femme fatale !
— Soldat sans munitions.
— Hystérique !
— …

Deux mois plus tard, ils se marièrent et n’eurent qu’à jouir … de la vie.

© Max-Louis MARCETTEAU 2020